iwannabeasushi (./1307) :
Donc bien évidemment, on peut être libéral et refuser des valeurs qui sont en totale contradiction avec celles dont l'Occident est l'héritier.
Ha ha ha !
Un vrai parfait libéral refuserait ces valeurs
sur le plan de sa morale strictement personnelle mais n'introduirait pas ce débat dans l'espace politique et s'inquiéterait beaucoup que l'État s'empare du sujet pour légiférer. ( le libéralisme c'est le confinement à la sphère privée des valeurs morales, l'État devant pour sa part être moralement neutre )
Si tu juges que nos états doivent
défendre certaines valeurs (p.ex les valeurs même du libéralisme, ou de trucs flous comme "l'Occident" ou "la civilisation judéo-chrétienne"... ), tu n'es pas parfaitement libéral, et sur ce point tu serais même parfaitement antilibéral.
Imaginons que je sois un catholique-très-fanatique (un mix entre Bloy et J. De Maîstre ) à l'époque du débat sur la laïcité proposée de l'état français, et qu'au nom de ma morale personnelle qui est celle "des valeurs de notre société et de notre civilisation depuis 2000 ans" je veux que l'état français défende haut nos valeurs ( voire les répande dans le monde grâce à la vertu de l'exemple )
Tu me répondrais sûrement je je serais un détestable fanatique anit-libéral (le libéralisme est né
contre ces gens-là ) et tu aurais tout-à-fait raison. Bon et bien toi tu fais aujourd'hui exactement la même chose en ayant changé de corpus moral.... ....
Devenir en pratique antilibéral pour imposer nos sociétés libérales, c'est un peu comme faire la guerre pour défendre le pacifisme : l'aveu de l' échec total de la théorie défendue. Dans la société libérale telle que la pensée libérale l'avait imaginée, il n'y aurait eu aucune valeur à défendre puisque les valeurs libérales se seraient magiquement répandues
par appât du gain... ( le pendant politico-social de la main invisible )
iwannabeasushi (./1307) :
Prétendre, même à 5%, être parfois un esprit pur qui n'est pas encombré de sa culture et de son éducation, c'est soit risible, soit de mauvaise foi.
Je ne voulais pas prétendre cela. Distance ne veut pas dire annihilation du moi. ( mais plutôt une sorte de joyeuse et triste suspension ou retraite, oui retraite du moi -- du à ses propres supercheries, on sera d'accord...). Par distance j'entends surtout ne pas mêler de caractère affectif, de valeurs ou de préférences de goût, et être même capable de comprendre leurs exacts contraires sur un plan purement intellectuel, formel.
Cela ne veut pas du tout dire que le "moi" est absent, bien au contraire... seuls certains "mois" très particuliers qui ont suivis une évolution bien spécifique arrivent à cette (terrible) impasse-là. Dans un de ses anciens bouquins R. Debray affirme que « Les meilleurs penseurs sont ceux qui pensent contre eux-mêmes ». Il y a quelque chose de ça si tu veux. ( ou pensons par exemple au «Emma Bovary, c'est moi » de Flaubert ) Pas du tout un "esprit pur" mais disons un esprit "multiple", qui à force de combattre contre lui-même sait percevoir les choses d'une certaine façon. Non un esprit purement objectif mais peut-être bien un esprit neutre par rapport aux différentes forces qui le tiraillent.