very (./149) :Hm, c'est un joli raccourci qui n'est pas franchement vrai. Les régimes totalitaires se basent sur l'intention comme sur des faits (justement en les retirant de leur contexte et de leur intention), mais aussi sur tout ce qui ne fait partie ni de l'un ni de l'autre (ou qui en est un mélange). Typiquement, l'appartenance à une caste, une religion ou une ethnie. C'est un fait qui est utilisé, et auquel on va ajouter un peu d'intention et beaucoup de mauvaise foi ("les {juif;musulmans;kurdes;pygmées;noirs;tutsis;...} sont ceci ou cela, et même ceux qui ne sont pas ceci ou cela font partie de ce groupe et méritent donc de...").
On comprend vite à la lueur de cet exemple pourquoi c'est le type de jugement favori des régimes totalitaires.
Juger le comportement factuel, c'est beau et important (on le retrouve d'ailleurs dans "les Hommes naissent libres et égaux en droits"). Mais ce doit être assorti d'une dose d'analyse et de recul tout simplement parce que c'est le meilleur moyen de ne pas voir l'injustice de certaines situations, les biais du droit et la capacité qu'ont certains de se dégager de toute responsabilité tout en étant partie prenante (mais comme ils ont les capacités/les compétences/les relations/les moyens d'utiliser les travers du droit, ils ont une prime de sécurité ; l'exemple du fisc que j'ai donné plus haut est, à mon avis, très bon : tant que tu juges le comportement factuel, tu accables les plus faibles tout en laissant tranquille les privilégiés ; si tu regardes l'intention, ça te permet au moins de voir comment faire évoluer la loi et les règles).
Sinon,
very (./149) :Je ne suis pas d'accord avec ça. Je pense très sincèrement qu'il y a des mécanismes psychologiques et neurologiques qui font que le cerveau est capable de débrancher certaines zones relatives à l'empathie, comme une sécurité pour éviter justement la culpabilité. Pour eux, c'est "un jeu", l'autre "est consentant" par son attitude, c'est "rigolo" ou même "je en fais pas grand chose par rapport aux autres, je suis même plutôt cool avec lui/elle".
Je pense que la plupart des gamins ont conscience qu'ils emmerdent un bouc émissaires lorsqu'ils le font.... mais ils ne ne sentent pas du tout coupable, car à leur yeux le bouc-émissaire mérite ce qui lui arrive
On a la même chose avec les mecs qui harcèlent les filles dans la rue. Dans des niveaux différents, on retrouve ces comportements dans les systèmes de castes hindous ou dans les rapports de certains juifs avec certains musulmans ou de certains musulmans avec certains juifs (on retire l'humanité à l'autre, ainsi on n'a plus à avoir honte ou à être coupable si cet autre est, par essence, moins qu'un animal).
Oui, il faut punir les faits, mais si rien n'est fait en parallèle pour faire comprendre qu'il y a un biais cognitif, la punition n'est pas comprise, il y a un ressentiment encore plus fort, et c'est l'escalade.
Je ne compte pas le nombre de fois où un harceleur s'est fait prendre, punir, et est revenu se venger encore plus fort (et de façon encore plus retorse) parce qu'il n'avait pas compris et qu'il estimait de fait que le responsable de la punition était la victime et non lui-même.
C'est un travail de tous les jours avec les enfants. Expliquer que s'il fait une colère parce qu'il n'a pas ce qu'il veut et casse quelque chose, il est le premier à se punir parce que, du coup, on va passer du temps à réparer la bêtise alors qu'on aurait pu s'occuper de l'enfant. Lui apprendre à verbaliser, à dire les choses, à trouver des exutoires à la violence intérieure. Apprendre à remonter le fil de la violence jusqu'à la source, c'est aussi faire comprendre où est la faute. C'est prendre le temps de parler et d'écouter.
Foutre une raclée, c'est montrer que la seule solution face à la violence, c'est la violence. C'est donner aux enfants le modèle à l'enfant que s'il s'estime lésé, il est en droit d'être le juge de la situation et de mener des représailles.